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Vivre avec eux, c’est pas mon taff… j’suis psy, pas Mère Térésa !

Au début, ça me rendait dingue d’entendre ces conneries, puis on s’met à douter parfois. Malgré tous ces « professionnels » qui ne font que passer, j’me dis qu’eux bossent pour le social, moi j’dois l’avoir en moi le social. « T’es trop passionnée…t’as pas envie de lâcher prise parfois, … arrête avec ton téléphone et tes collègues…c’est bizarre de s’attacher à ce genre de jeunes. » Ce discours, j l’entends de mes proches et des moins proches aussi. C’est compliqué de ne pas pouvoir partager ce monde tellement difficile mais en même temps enrichissant. Etre addict au point de passer aux extrêmes, et osciller du manque à l’écœurement. C’est déstabilisant, je dirais même que ça me bouffe autant que je m’en nourris. C’est l’humain qui me fait tenir, ce pourquoi j’fais encore ce métier aujourd’hui, « avec ces sales gosses » comme ils sont si joliment appelés.

Introduction

Septembre 2007, toute jeune diplômée, à 23 ans j’rêve de travaille dans le domaine de la délinquance juvénile. Une offre d’emploi apparait sur internet. Tout ce que je désirais dans un poste de psy. Mais il ne pouvait qu’attirer des prétendants. Un temps plein en privé, c’est la perle rare pour un psy qui sort de la fac. J’suis reçue en entretien de recrutement, j’passe plusieurs étapes ce qui m’donne de l’espoir. Au final, j m’ retrouve avec deux autres psy « théoriquement perfect », j’faisais pas le poids. C’est pas le tout d’avoir envie, j’avais aussi certainement un manque de charisme ou de confiance en moi. En tout cas, j’me rappelle avoir reçu une vulgaire lettre de refus, toute prête, quasi anonyme. J’étais déçue, c’était mon premier échec (bon j’avoue c’est le deuxième j’avais loupé mon Bac). C’est un rêve qui s’effondre, mais j’relativise en m’disant que j’suis peut-être encore trop jeune pour ce genre de structure et de public. Les centres éducatifs fermés c’est pas vieux, ça existe depuis 2/3 ans. C’est la mode de Rachida Dati à l’époque. Après ça, j’me démonte pas. Je commence à envoyer 200 candidatures spontanées qui coûtés un bras. J’ai eu l’impression d’avoir claqué autant de tunes à la poste qu’au magasin de chaussures. Grâce à ma pote Elo, j’arrive à dégoter un entretien en maison d’enfants. De chez moi, c’est le bout du monde. Mais faut bien commencer par quelque chose. 8 mois en Aide Sociale à l’Enfance, j’apprécie biensûr de prendre en charge des petits bouts de 5 ans, mais j’arrive pas à avoir le feeling ; le truc qui me fait dire ce pourquoi j’fais ce putin de taff. En psycho on appelle ça le mouvement transféro-contretransférentiel. J’vais éviter ce genre de terme parce que j’veux surtout parler avec le cœur mais parfois j’aurais pas trop le choix. J’suis certaine, en tout cas de faire kiffer mes collègues psycho qui me liront. Mi-juin 2008, installée dans mon bureau au rez de chaussée de la MECS. J’regarde par la fenêtre les gamins jouaient dans la cour. J’ai un super bureau très bien équipé : jeux, pâte à modeler, livres, ordinateur. Mais j’ai toujours froid. J’m’y retrouve pas. C’est pas chez moi ici. J’suis pas moi. Après, c’est mon premier taff, mon premier salaire de psy. J’suis autonome. J’pense plus à construire ma vie perso : voyages, projets de mariage, location d’un appart plus grand (parce que HLM c’est pesant à force). Ma mère est fière de moi et moi aussi. Mais j’sais pas trop… C’est pas encore la vie professionnelle que j’imaginais. Midi pile, l’heure du repas, j’m’apprête à quitter mon bureau. Mon portable sonne… « Bonjour c’est le directeur du Centre Educatif Fermé… Êtes-vous disponible à partir du 1er juillet pour venir travailler chez nous ? ». Mais non la blague ! 8 mois après j’suis sur le cul et en même temps excitée. La psy recrutée est partie. Bah tant mieux j’avais envie de lui dire. Enfin j’vais bosser ce pourquoi j’aime ce métier. Bon, même si ma fierté me dit que j’suis le second choix, vrai j’m’en tape, j’suis trop contente. 1er Juillet 2008, j’pose un pied au CEF…


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